Pointe d'Ayace le 4 septembre 2023 (T5 mais sans chemin)

Vite en arrivant en fin de journée avant de planter la tente à côté du petit lac de Crête Sèche.

La pointe d'Ayace est un sommet qui ne promet rien. Qui ne sert à presque rien. Ni haut, ni bas, juste immobile, juste dans le vent du haut Val de Bagnes. Pas d'arrête prestigieuse ni une altitude mémorable. 3019 mètres en dessus de la mer. Un gros tas de cailloux qui demande qu'à survivre au temps.  Son antécime à 2749 mètres est toute différente. Engazonnée avec un rocher sain et des bonnes prises. Je vais l'aborder par l'arrête Nord Est en lui passant sous son sommet Est. Comme je ne suis pas copain avec le diable, inutile de le tenter. Je le prends au moins raide sur une roche finalement mieux qu'espérée en la voyant depuis le bas.

C'est en arrivant en haut que tu découvres véritablement sa valeur. Une lucarne ouverte sur le Val de Bagnes. ouverte sur le monde sauvage de Mauvoisin. Tutoyant le Mont Gelé, Ayace impose le respect depuis sont sommet. Tu comprends sa prestance quand tu foules sa pointe. C'est clairement un sommet qui gagne à être connu en hiver et je me réjouis déjà d'y revenir pour y laisser ma trace !

Au pied de son arête Nord tu y verras les stries typiques du glacier de jadis, le glacier de Crête Sèche à cet endroit, c'est pris de bec avec Epicoune tout en chariant les restes morainiques du vallon qui a marqué le rocher de son empreinte. Témoin historique du Petit Âge Glaciaire vers 1820.

Je m'y sens bien, calme et riche de montagne. Pas pressé, pas stressé, juste là, survivant du temps et reconnaissant. Seul, face au Grand Combin.

 

L'accès en vélo électrique jusqu'à la prise d'eau d'Otemma depuis le barrage de Mauvoisin (1heure environ)

 

La soirée a été un moment du pur bonheur auprès du lac à écouter chanter le ruisseau d'Epicoune au loin. Le lac sans un souffle de vent c'est colorié du plus beau des oranges pour décalquer parfaitement les montagnes de l'autre côté de la vallée jusqu'au Petit Mont Collon tout au loin

 

La Tsoume des Boucs le 5 septembre 2023

La Tsoume des boucs est un sommet qui donne pas envie du tout quand tu le vois depuis le vallon de crête sèche.

Raide avec des éboulis striant toute sa face Ouest et finissant par trois becs austères. A quoi bon monter l'en haut. Typiquement inutile, mais c'est justement le privilège d'avoir le temps de tutoyer l'inutile... Pour le jeux de cocher une case de plus sur un sommet du Val de Bagnes.

 

Le vallon de Crête Sèche est toujours aussi caillouteux et aride, le chemin T4 qui monte au col présente quelques chaînes pour s'agripper mais a le grand avantage d'être à l'ombre le matin.

 

Je fais le tour par son versant italien depuis le col de Crête Sèche, dans les éboulis ou quelques cairns te tracent le chemin. Je prends mon temps et regarde mes pieds avant de les poser sur chaque cailloux instables. 

 

J'arrive sur son premier sommet et continue sur le fil de l'arrête en direction du Nord. Arrête facile en versant Est pour rejoindre le surplomb qui domine le col de Chardoney. Les deux derniers surplombs demandent de l'attention, le vide est présent sur les deux faces mais la roche est excellente avec des prises correctes.

Je déplore les traces d'un vieux drapeau de prière tibétain qui finit de s'automutiler dans le vent du Nord. Je peux comprendre la démarche de celui qui l'a posé mais cela reste une pollution énorme de fibre de polyester qui se répand dans les montagnes, les glaciers, l'eau et notre estomac... la planète n'a plus besoin de cela !  d'autant qu'aujourd'hui on peut obtenir des drapeaux en coton !  https://www.tibet-markets.ch/fr/drapeaux-de-priere-tibetains-en-coton-de-137866030.html

 

Capharnaüm de rochers instables dans la descente par le vallon sous le Bec de Chardonney et son très vieux glacier qui n'a plus l'air d'en être un ! il faut regarder intensément l'invisible pour le voir enfin... sous son linceul de débris rocheux.

1 heure à divaguer sur ce glacier m'ouvre l'esprit... Enfin me diras tu, c'est pas trop tôt :) 

 

A force de regarder le glacier enfermé sous les éboulis et d'écouter son silence qui dure depuis une vingtaine d'année il me semble avoir enfin compris la question qui me turlupine depuis 2 ans...

Comment ont fait toutes ces roches pour le recouvrir en si peu de temps ? (20 ans environ)

Et si ce ne serait pas le glacier d'avant le Pag qui survit par cette protection datant de plusieurs centaines d'années, voir milliers d'années ? Le glacier qui le recouvrait il y a une vingtaine d'années était le nouveau né du PAG, il s'est reconstruit patiemment par dessus l'ancien

Toutes les pièces s'accordent ! Mais ouiiiii.

Ce qui voudrait dire que nos glaciers entre 2000 et 2020 sont à peu de choses près les mêmes qu'il y a 500 ans...

Comme toujours, les interrogations restent vives et la science pourra certainement affirmer ou infirmer cette idée un jour !

Je suis bien incapable de savoir si je suis le seul à penser cela mais je vais creuser un peu la question ces prochains jours.

 

Retour par le col et descente à mon bivouac, une petite sieste et retour sur Mauvoisin