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Extrait de mon prochain roman
2050
Ce soir, c’est tempête.
Le vent claque et fouette les vitres, hurle contre la cabane comme une bête enfermée qui veut sortir de sa cage pour nous dévorer.
La pluie gifle la fenêtre de ses mains glacées, avec la colère jalouse d’un ciel qui veut tout briser, qui veut en finir une fois pour toute avec cette civilisation saccageuse, briseuse d'âme qui s'accroche encore avec dédain.
Le grondement ne cesse jamais, seulement déchiré par des rafales terribles, comme des coups de massue sur la montagne.
La nature se déchaîne sur mon âme qui pleure, un torrent jailli des entrailles du glacier de Sonadon. Inutile de vouloir l’arrêter : il est fou, sors de son lit dans une rage ultime.
Et moi, je ne dors pas.
Je veille, submergé par la force du monde, je me cramponne à ce qui reste en vie, et dans ma solitude je rêve de toi, dans la pièce d'à côté. Toi qui charmes le vent, qui le domptes comme on joue avec un cerf-volant.
Les poutres craquent, les haubans du bûcher se tendent à rompre pour retenir l’assaut.
Le tonnerre gronde et explose autour, sans répit.
Les éclairs allument la nuit, comme un théâtre brutal d'un monde qui n'existe pas : ils réveillent la pointe du Botseresse, frappent le Vélan comme pour punir son orgueil de tenir encore debout.
Sous les projecteurs furieux du ciel, le col de Valsorey se replie sur lui-même, serrant contre son flanc le dernier lambeau de glace.
Les moraines s’ouvrent en torrents éphémères, dévalant avec rage, arrachant toutes les fleurs sauvages qui avaient osé survivre au début d’été.
Le Combin pleure : il libère ses roches instables, les précipitant dans un vacarme qui se mêle à l’orage. Jeux de quilles mortel qui détruit tout sur son passage.
Mes cheveux et mes poils se dressent dans cet environnement inondé d'électricité statique. Des lueurs vertes dansent dans la nuit.
Et en ce moment, dans le vallon de Valsorey, c’est l’ultime colère du monde qui s’abat.
Une apocalypse, nue, brute, rugissante, éclatante, qui engloutit tout… sauf mes rêves et mes espoirs de survie.
Tout en bas, le torrent de Valsorey est en crue, une bête blanche et rugissante qui dévore ses berges.
Les vaches tremblent, massées contre les murets de pierre, leurs yeux reflétant les éclairs comme des lampes apeurées.
L’orage roule au-dessus d’elles, et chaque coup de tonnerre leur fait tressaillir l’échine.
Même les cloches, secouées par la panique, sonnent à contretemps, comme pour alerter toute la vallée que la montagne est en colère. Une crise sans pareil, un dernier combat contre l'humanité.
Demain ne sera plus le même. Le silence sera plus oppressant, les lumières plus vives. Chacun pansera ses plaies pour oublier... Les survivants, les yeux hagards ne seront plus jamais joyeux.
La colère d'un Dieux sans pardon. Qui combat pour détruire ce qui reste encore de vivant sur cette terre décadente.
On nous avait promis 2 degrés, il en fait 4. Les hivers seront un peu plus doux, les étés un peu trop chaud.
Mais c'est la vie qu'on voit partir !
À Bourg St Pierre, quelques volets s'ouvrent. Quelques têtes apparaissent. Survivants de l'apocalypse.
Le torrent de Valsorey à tout raflé. Les sapins en travers du village se reposent enfin.
Les manches sont déjà retroussées mais les vieux savent. Ils ont compris cette fois, que leur monde s'écroule pour de vrai.
Dix mille ans d'histoire stoppé net, après presque 2 siècles de débauche pétrolière .
Ford, qui était un génie de la mécanique est devenu en une nuit, l'assassin du monde.
Le vieux Michel a survécu. Ses yeux humides pleurent ce carnage. À son âge tu n'as plus peur de rien mais les souvenirs se font lointains.
Le Vallon ne sera plus jamais le même. Son Vallon de Valsorey en gardera les traces pour plusieurs centaines d'années.
Il est temps de toute façon.
Quand les souvenirs se font dépasser par le futur. L'homme se perd dans un présent sans racines.
Je ne suis plus qu'un rêveur d'ombre attendant le jugement suprême.
Pourtant , cette fleur minuscule qui émerge de cette lave torrentielle me rappelle que même dans le chaos, la vie ose s’inventer une place.
Je suis pris entre espoir et déception, je suis le balancier qui oscille entre deux vérités.
…je suis la question que le temps ne répondra jamais.
Le regard vide, je cherche la réponse dans le silence qui m’entoure. Toute ma tristesse descend sur ma joue par cette simple larme.
…dans la mémoire des pierres et du vent.
…comme si elle se cachait derrière mes propres doutes.
…et je découvre qu’elle n’existe peut-être pas.
Survivant du vallon, je porte la mémoire des neiges disparues.
…je marche parmi les échos des glaciers défaits.
…je suis le témoin fragile d’un monde qui s’efface.
…je m’accroche aux racines et aux pierres comme à des promesses.
…je cherche, dans le souffle du torrent, la raison de continuer.
A quoi bon être témoin si la mémoire s'efface plus vite que les pierres.
À quoi bon être vivant si l’on ne sent plus le vent raconter les montagnes. Si nos mains oublient à quoi servent les caresses.
…si l’on fuit la douleur au prix d’oublier la joie.
Je quitterai cette terre trop chaude sans regret, un dernier coup d'œil au Grand Combin et je laisserai mon âme s'envoler.
Dans la cabane accrochée à la montagne, l’été tardif résistait encore, accroché aux pentes dorées. Mais déjà, sur les arêtes, la première neige posait son voile discret, comme une caresse d’adieu.
Ils s’étaient réfugiés là-haut, loin du monde, dans ce nid de bois où chaque poutre gardait le souffle des alpinistes d’hier. Le feu crépitait doucement, et dehors, le vent hésitait entre la douceur d’août et la morsure d’octobre.
Lui et elle savaient. Que les chemins allaient se séparer, que la vallée, bientôt, avalerait leurs pas et leurs promesses. Mais en cette ultime nuit, il n’y eut ni larmes, ni regrets. Seulement la lumière fragile des étoiles glissant par la petite fenêtre, la chaleur de deux corps qui n’avaient plus besoin de mots.
L’amour fut roi, la tendresse reine. Ils partagèrent le pain, le vin, et leurs songes, comme si l’éternité pouvait tenir dans quelques heures. Dans leurs bras, ils gravirent des sommets invisibles, là où les rêves s’embrassent au-dessus des nuages.
Au matin, la neige avait blanchi le seuil. Le silence régnait sur la vallée. Ils se quittèrent sans promesse, mais avec cette certitude intime : dans le grand livre de la montagne, leur histoire ne disparaîtrait pas. Elle resterait gravée, comme ces cairns dressés au bord du vide : fragiles, mais indestructibles dans la mémoire de ceux qui passent.
Et ainsi, leur amour s’endormit là-haut, doucement, comme un flocon sur une pierre tiède.
Envoi du 21 janvier 205
Hello les P’tits Loups,
Tout d’abord, merci pour votre achat ou votre intérêt pour Le Louveteau de Bagnes, mes calendriers 2025, ou tout simplement mon site internet.
Savez-vous qu’il y a des nouvelles sur mon site ? Découvrez-les ici : Les News.
Bon, je l’avoue, je ne suis pas très assidu… Mais je passe tellement de temps en montagne qu’il m’arrive parfois d’oublier où j’habite !
La plupart de mes textes sont d’ailleurs écrits là-haut, où je me sens bien. Là où il n’y a pas besoin de trop réfléchir pour raconter les choses extraordinaires qui s’y passent. Des rencontres avec des animaux ou des humains, souvent des personnes incroyables : les gardiennes et gardiens de cabanes, les vieux loups solitaires comme moi, ou tout simplement les amoureux de la nature.
J’espère que mon premier livre vous a plu. N’hésitez pas à laisser un commentaire sur la page dédiée à Le Louveteau de Bagnes : Laissez votre avis.
Cet été, le Val de Bagnes n’a pas été épargné par le Fregnoley. Les habitants ont souffert et les cicatrices sont encore bien visibles.
Voici donc, en avant-première, mon deuxième livre : Le Mystère du Fregnoley (20 CHF).
La superbe couverture a été réalisée par Tim Meylan, professeur à l’École d’Arts Visuels et de Graphisme à Sierre (EDHEA).
Pour chaque exemplaire vendu, 15 CHF seront reversés à la Fondation Planète Enfant Malade, soit la totalité de ma marge bénéficiaire. Découvrez leur action.
Le livre sera disponible courant février 2025. Il sera différent de: Le Louveteau de Bagnes, mais restera, je l’espère, un hymne à la Vallée et à la montagne. Vous pouvez déjà le
commander ici : Précommandez Le Mystère du Fregnoley.
Je peux également envoyer un exemplaire à une adresse de vos proches si vous le précisez dans les commentaires.
Voilà, après tout ce temps de silence, cette news est peut-être un peu longue !
Un grand merci pour votre soutien à la Fondation et à la lecture.
Si vous avez une idée, une pensée ou une demande spéciale, n’hésitez pas à me joindre via WhatsApp au : 079 653 61 60 (en précisant : news Louveteau). Je
vous répondrai dans les 24 heures.
Avec toute ma sympathie.
Eric Schopfer
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