26 mai 2023 Col de Charmotane

 

Trace gps

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Pourquoi m'attire t-il, le raccourci du ciel ?

 

La pente m'effraye, me prend, "m'insomniante", me persécute et m'enrichi !  c'est la fin de la mort inexistante de la jeunesse, l'âge prend tout son temps mais n'efface pas le passé. 

Le premier virage m'en doute à chaque fois, elle est comment cette  neige, elle est ou cette plaque à vent, elle est ou cette plaque de glace ? Vais-je pouvoir la tutoyer jusqu'à son bas ? Vais-je devoir l'apprivoiser de tout son long ? Me pardonnera-t-elle de la défigurer ? De la tracer, de l'usurper, de voler son présent ? 

 

Le raccourci du ciel, c'est droit haut dans le couloir... la chute c'est le moyen le plus rapide d'y arriver ...

 

Le rite à lieu… toujours, sans détours, dans le respect et la conscience de vouloir bien faire... à l'intérieur de moi... à la porte de l'âme.

La veille, je cajole mes skis. Je farte, j'aiguise, je peaufine, je "minutieuse", je prend mon temps, à la lumière de ma frontale dans ma cabane à ski. Le rite subit le temps, le bonhomme subit l'âge, le poids des années et les cernes de la vie.

À chaque fin de saison sera la dernière, peut-être une de plus mais rien de plus. Le doute revient toujours à l'esprit aux premières neiges d'automne.

Il sera bientôt temps de réfléchir, depuis le temps. Il faudra que j'arrête de jouer au fou. La pente deviendra moins accueillante et plus pentue, je garde l'image de la jeunesse mais subit les affres du temps.

L'approche reste une démarche enrichissante et accueillante si elle n'est plus trop longue. Les genoux s'appuient nettement sur la pente, le piolet s'enfonce plus profondément, la trace du raccourci semble longue et le cheminement balbutiant.  Mettre les skis est une affaire sérieuse, le premier virage est timide, douteux, silencieux… comme le vélo, l'oubli n'existe pas... et la chute non plus !

Tout de suite après le premier virage, la descente est belle, prenante, apaisante. Je m'en veux d'avoir douté,  je pourrais m'enorgueillir de l'instant...  merci sans façon, je suis de moins en moins pressé de respirer le plat, je veux vivre cette pente encore un instant.

 

Après, l'air est tellement plus pur, le ciel tellement plus bleu… c'est fou ce que cette journée est belle.

 

Le souvenir de 1986 reste présent, toujours, comme un pied dans une porte…  des skis de 2,10 m. pesant une tonne, pente à 50°, 30 de poudre quand l'avalanche m'a happé et m'a enfermé 700 mètres plus bas. En ce jour j'ai appris à voler dans le ciel et à calmer mes ardeurs de pente.

3 mai 2023 face Nord de Theysachaux
3 mai 2023 face Nord de Theysachaux
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 19 avril 2023 La Pointe de la Vouasson, la ballade à Colinette 

Ça fait des années que je devais faire cette pointe d'avant Arolla.  Des années que je passe devant le parking sans jamais m'arrêter !

Les contreforts du cœur des Alpes, peuplée de gens d'en bas. Un parking si bondé qu'un jour il vont goudronner la gouille pour en rajouter… 

La ballade du lac Bleu à l'ombre des mélèzes d'automne, un quignon de viande séchée dans le sac, une tomme d'alpage bien mûre… et le plein de touriste qui piaillent sur insta !

 

Je dois avouer que je n'étais pas chaud, mais alors pas chaud du tout.

J'ai attendu le jour abandonné... qui n'intéresse plus personne, ou il faut porter les skis dès la sortie de la Gouille pour mériter le sommet. 

Bingo ! j'ai croisé 2 peaux de phoqueur qui étaient partis de la cabane des Aiguilles Rouges et qui ont renoncé 20 mètres avant le sommet en suant comme des bêtes à essayer de monter la dernière pente à pied en enfonçant jusqu'à la taille!

 

Mériter l'ascension solo, c'est supporter la confrontation avec soi-même et la montagne. C'est trimer au chant des premiers oiseaux  dans les mélèzes qui se réveillent paresseusement en sentant le printemps. C'est accepter qu'un chevreuil te regarde pisser tranquillement sur une fougère en bougilleonant son petit cul blanc pour bien te montrer qu'il est mort de rire ! 

C'est aussi accepter le regel sec et croustillant du bon matin, accepter la chaleur sur les faces Sud, accepter le soleil qui brûle ton nez, accepter les cumulus qui bouchent d'un coup ton horizon en moins de temps qu'il te faut pour enlever tes peaux !

C'est accepter que tout devient mystique, que la trace t'aiguille... rouge au sommet...

 

J'arrive sous les séracs du glacier supérieur des Aiguilles Rouges et constate que, oui il y a des glaçons par ici, oui ça ressemble à la montagne, la vraie, oui c'est beau, c'est presque indécent. La Pointe des Darbonires et le Mont de l'Etoile remplissent mon regard béat et me menacent de leurs faces Sud en plein soleil du matin.

Le vallon est chaleureux. Accueillant de pente, accueillant de neige stable, accueillant pour la tête.

C'est un vallon qui ne fera que passer dans ma mémoire mais qui laissera une place de choix dans mes souvenirs.

En traversant le glacier de la Vouasson, je laisse glisser le temps comme un sublime dessert avant le plat de résistance. La poudreuse est douce et légère comme sur un nuage du ciel, ou la vie ne compte plus que pour l'âme.

 

Le sommet se découvre enfin et rempli mon monde, je prends le temps de vivre l'instant, de ralentir le pas pour mieux garder le souvenir.

Difficile tâche que de garder les souvenirs du ciel.

Difficile tâche que d'écouter les cendres du souvenir, qui flottent dans le ciel environnant et qui inondent le lieu de leurs présences délicates.

Le sommet, finalement c'est pas si important.

Ce qui est important c'est la manière. C'est le retour vers les gens qui comptent.

C'est la trace que je laisse dans la neige et dans mon esprit.

Et le choix de ce que je vais finalement en faire !

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    Coin-coin (samedi, 27 mai 2023 16:31)

    Toujours beau cette pointe de Vouasson... joliii

4 avril 2023 La Luette à la recherche du Nanga Parbat.

 

J'arrive au Pas de Chèvre avec ardeur.

La Luette c'est un bien joli nom, comme l'alouette ou ma bichette. Ca inspire la confiance, la délicatesse féminine et la passion. Ses formes rondes et accueillantes ont été sculptées avec attention et douceur par le vent et le temps qui passe.

Voisine de Pointe Noire ou se pose la cabane des Dix qui domine le glacier en regardant le Mont Blanc de Cheillon avec bienveillance.

Quand tu arrives par le Pas de Chèvre c'est la porte du paradis, la découverte d'une nouvelle planète, le plus beau cul du monde.

Les deux  choucas qui viennent de nul part restent les gardiens placides du lieu et n'attendaient que mon arrivée pour s'élancer dans les tourbillons d'air du col. Ils volent comme dans un jeux ultime ou l'erreur n'est pas permise.

 

Pour accéder au paradis, il faut emprunter les échelles arrimées dans la falaise brune et abrupte qui descend dans le vallon. En bas, les glacicules barrent le passage et s'étirent en hauteur chaque année.  Le glacier de Tsénâ Réfien et le glacier de Cheillon se marient sans se mélanger, comme tous les glaciers du monde, ils font lit séparé.

Ils font route commune vers la fonte éternelle qui façonne leur destin et filent sans se presser vers leur mort toute proche. Le glacier a perdu 1200 mètres de longueur et plus de 100 mètres de hauteur depuis 1924.

Je croise les flux de glace qui viennent des sommets et remonte la moraine en direction de la cabane des Dix. Sur le replat, je m'engage en direction du glacier de la Luette par sa rive droite. Le silence assourdissant glisse sur le temps et m'ouvre la porte d'une nouvelle dimension.

La découverte d'un monde blanc... bleu et immobile pour l'oeil mais toujours en mouvement pour le monde, me prend par surprise.

J'entend le lagopède sans le voir, j'entends les premiers oiseaux des cimes, le bruissement du vent sur la neige et le chuchotement de mes skis. Le ciel me paraît vif et limpide, il se détache clairement des sommets devant moi, Le vent du nord souffle l'arrête qui mène au sommet sans discontinuer.  Le Clocher de Cheillon, 600 mètres en aval du sommet semble me regarder en tournant son regard bienveillant à mesure que je le contourne. Je trace ma ligne plein ouest, sur une pente régulière et presque douce. j'apprécie cette montée en dehors du monde, dans mes pensées et mes rêves de montagnes. Mon rythme s'allie à l'environnement et les aiguilles de ma montre commencent à ralentir.

- Je me demande ce qu'il y a sous cette glace de Luette ?

Une histoire passionnante du temps. Depuis la nuit des temps ?  Je n'arrive pas imaginer sa présence sur l'échelle géologique sans sortir de ma zone de connaissance, et je suis jaloux du temps, jaloux du vent qui passe et qui façonne le glacier sans m'en toucher mot !

J'aime cet état apaisant et presque ensorcelant ou le rêve copule avec la trace et rejoint le chemin du sommet, ou ma vue s'arrête sur le Sé Quinodoz qui se découpe dans l'immensité du ciel en cette sublime journée d'avril.

J'aime sentir la trace et ses dangers, sentir le vent qui use la neige, ressentir le froid piquant du matin, accepter la chaleur moite de l'après-midi. J'aime cette fatigue enivrante qui me pousse à aller plus loin et plus haut, au delà de l'horizon juste pour voir ce qu'il y a derrière !  Je débouche au col en aval de l'arrête finale. 

Je regarde le glacier de Giétroz tout en bas...   Si blanc, si vierge, si solitaire. Il prend tellement de place dans l'espace et dans mon regard que je ne peux me détacher de son hypnotique nonchalance.

Le Grand Combin de Grafeneire inonde l'horizon de son géantisme. Corbassière, Boveire, Grand Aget et le Pleureur remplissent le tableau surnaturel du lieu. 

J'enlève mes skis que je prends bien soin d'ancrer profondément dans la neige en attendant que je finisse cette ascension extra humaine.  Je m'engage sur l'arrête par une ancienne trace partiellement recouverte de neige soufflée en essayant de garder mon équilibre et titubant dans le vent.

Après 20 minutes, le sommet m'accueille froidement mais avec courtoisie. SEUL auprès du ciel, dans les tourbillons de neige qui m'entourent.  Le monde m'apparaît si bas dans les vallées que j'ai l'impression d'être le dernier rescapé du passé... ou le premier passager du futur.

Je cherche le Nanga Parbat, sommet ultime, celui de mes rêves. 

Le sommet fou, celui qui change chaque hiver, qui se déplace dans ma mémoire, le sommet qu'il ne faut pas vaincre mais apprivoiser. Le sommet qui hante les téméraires et qui courtise le montagnard. Je le cherche en haut, en bas, de tous les côtés sans pouvoir le toucher ni le voir... Il y a des fois ou je me demande même s'il existe ?

Je reste le témoin privilégié de la colère du ciel, de sa douceur et de sa limpidité.

Quel plaisir de partager ce moment avec la vie. 

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    Coin-coin (samedi, 27 mai 2023 16:32)

    Beau texte, on s'y croirait ! Merci

4 février à la recherche du ciel.

 

J'arrive au pont de Boveire sous une neige éparse et virevoltante, celle qui ne mouille pas jusqu'à ce que les gouttes te tombent sur le nez et que tu t'aperçois que tu es trempé de partout. Je traverse le torrent d'Allèves pour passer en rive droite. Le brouillard rempli complètement le vallon du Ritord, au pied de la face Nord du Bonhomme du Tsappi. La trace qui m'a guidé jusque-là file en direction de la pointe de Toule.

Je suis content de me retrouver seul, et déçu de perdre cette trace qui m'aurait grandement facilité l'ascension.

Je longe le ruisseau qui malgré le froid continue inlassablement de descendre dans la vallée en se frayant un passage. Il serpente entre les cailloux et la glace, rien ne l'arrête. Il creuse des tunnels sous la neige quand il le faut, détourne les moraines et file sa vie au plus court.

Le torrent vient du glacier de Boveire, et un glacier ça vit hors saison, à son rythme. Cette eau provient de la fonte estivale 2022, elle a mis du temps à retrouver sa liberté,  elle a certainement passé une partie de l'automne à se prélasser dans un lac sous-glaciaire avant de déborder vers la vallée.

Je pénètre dans le stratus comme on rentre dans une forêt fantôme, les ombres deviennent sombres et l'horizon s'arrête à quelques dizaines de mètres. Je connais relativement bien le vallon même si cela fait bien 2 ans que je n'y suis pas revenu.

2 Tétras lyre me passent sur la tête à la vitesse d'un cheval au galop et me sortent de ma routine du moment.

Je trace dans un carton fragile et presque humide. À ma gauche l'ancienne moraine me guide en direction du glacier. Je passe en mode montagne… et pousse le curseur de ma concentration vers le haut.

A plus de 2000 m,  les quelques petits sapins que je croise encore s'estompent et s'évaporent dans cet univers de gouttelettes sublimées.  Je retrouve cette sensation privilégiée avec cet environnement restreint qui m'entoure.

Après une demi-heure dans cette soupe de brouillard, un doute m'envahit… finalement je suis ou ? Je ne vois pas la paroi Ouest du Mérignier qui devrait être à ma droite, Je ne croise que quelques cailloux inconnus et je me demande même si la pente va dans la bonne direction.

Mon cerveau me joue des tours, j'en suis presque certain, mais au bout d'un moment les doutent prennent de plus en plus de place et je perds de mon assurance. Je sors mon téléphone et ouvre mon application whiterisk… Aucune carte n'apparait, j'ai bien un point bleu qui me signal ma position mais rien autour ?

Purée, j'ai changé mon portable dernièrement et les cartes téléchargées sont restées dans l'ancien. Pas de réseau pour voir la carte en direct. Me voici dans une situation imprévue qui va m'obliger à rester très vigilant… je monte encore d'un cran le curseur et continue dans cette purée froide en direction du seul point de repère qu'il me reste... le haut.

En espérant que plus c'est haut… plus il fera beau :)

 

Après un quart d'heure environ, j'entends le bruit du ruisseaux sous mes pieds, il me suffira de suivre ce ronronnement pour rejoindre le glacier de Boveire. Une ombre apparait timidement à ma droite, la paroi du Mérignier à n'en presque pas douter.

Je continue de tracer sur le ruisseau  dans une neige qui devient plus légère. Je plante mon bâton et il part au fond… oups! Un mouvement de plus et je risque de tomber dans le torrent sous mes pieds. Dans ces cas, on parle de sueurs froides… j'aimerais plutôt parler de sueurs chaudes, parce que je sens perler les gouttes de transpirations sous mes aisselles.

Je me dégage de cette position très inconfortable et rêve de visibilité.

Je dois tourner à droite pour rejoindre le glacier, je n'entends plus le ruisseau et ne distingue plus le Mérignier non plus.  Le vallon s'espace et je suis perdu dans ce coton blanc. Je connais parfaitement la topologie du coin, j'en suis certain, mais cela fait plus d'une heure et demie que je vague et divague dans cette onde doucereuse.

Zing… un message sur mon portable et je saute sur mon écran,  du réseau veut dire une carte !

L'appli SLF est beaucoup trop lourde pour espérer voir mon chemin.

Mon application Wikiloc est plus réactive, je vois enfin ou je suis… et je suis presque ou je pensais enfin être… enfin presque, mais pas trop loin et pourtant pas si près non plus... ça dépend du point de vue mais comme il y en a pas... de vue ! je me contente du point.

10 minutes après, je vois le premier sérac du front de glacier. Je bloque mon curseur au niveau max et je m'engage  en rive gauche. Cela fait 3h30 que je suis parti de Bourg St Pierre.

Le brouillard montre des signes de faiblesses et je pense avoir plus de 100 m de visi devant moi. Tout s'arrange, je suis en forme, j'ai 1000 m de déniv derrière moi et presque la moitié de fait. Mes bottes sont remplies à environ 50% (en principe quand mes bottes sont pleines, je fais demi-tour)

Le glacier devant moi reste un point d'interrogation en ce qui concerne les crevasses à venir mais il me reste environ 400 m. sans trop de risque.  Je continue au plus près de la pente pour ne pas être trop sur le glacier.

J'entrevois une tête d'épingle bleue dans ce enchevêtrement de stratus, Une belle bouffée de bise pousse cette mousse blanche et opaque par-delà du vallon.  Je vois le sommet du Mérignier et distingue presque l'ombre du Ritord.

La trace devient pénible dans une neige soufflée et changeante, la pente devient plus raide et j'aligne les conversions en amont d'une paroi lugubre. La combe en dessus de moi est bien remplie, 2 vroums me confirment qu'il n'y a aucun doute à avoir, si je m'aventure dans une pente à plus de 30°, c'est craignos. Mon appli SLF me manque cruellement, il m'est arrivé de tracer un passage juste en tenant compte des couleurs de pente sur l'appli. Je devrais me fier à ma propre expérience, tout en sachant que si je suis encore vivant, mon expérience est forcément biaisée.

je contourne une pente plus raide sur 50 mètres mais il faut traverser cette combe pour déboucher sur le haut glacier de Boveire.  Dans ces moments, je parle à haute voix tout seul en pesant toutes les données que j'ai à ma dispo.  Il me faut  environ 5 minutes pour traverser cette combe, mais j'ai 1400 m dans mes bottes remplies aux 3/4, Est-ce que je dois passer lentement pour me faire le plus léger possible ou au contraire mettre le turbo pour y être le moins longtemps possible ?  Cette neige soufflée est-elle vieille ou récente ?  Qu'y a-t-il en dessous de cette surface ? Degré de pente ? Renoncer serait certainement plus sage. 

Je choisi l'option "escargot pressé" pour traverser cette combe, j'enclenche ma gopro pour la postérité qui saura me juger, et je n'ai aucun doute sur la sentence.

Je continue sur le glacier en direction  du col de Boveire, le ciel apparaît comme dans un rêve.

Les fortes rafales de vent du Nord traversent le glacier dans des tourbillons de fin du monde.

Le temps s'arrête, l'image est magique, l'instant est magique, le soleil pâle et froid, surréaliste, apocalyptique et d'un autre monde, sans vie humaine possible. Le stratus qui remonte la face Sud du Ritord est démembré, catapulté et soufflé par le vent du Nord  quand il veut passer par dessus le sommet. Le glacier devant moi me semble interminable, les crevasses invisibles m'effrayent plus profondément qu'un passage de combe. Trop de temps sous stress, trop d'émotions, trop de concentration, trop de trop. Je craque...

Je préfère renoncer.

Si j'ai encore une corde à améliorer dans l'approche alpinistique en solo, c'est clairement la volonté, plus d'énergie pour aller plus loin et d'analyse intelligente de la situation.

 

j'ai regretté cette décision moins de 100 mètres plus bas dans la descente. Il me re-faudra 5h30 d'effort pour revenir terminer cette ascension en solo. (que j'ai déjà faite en 2018)

J'étais à moins de 2 heures du sommet… quel con ! Mes bottes n'étaient même pas pleines !

trace GPS sur Wikiloc

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    Mitch (samedi, 27 mai 2023 16:33)

    Il faut une bonne dose de volonté pour avancer seul dans le brouillard !

6 janvier 2023  Cabane Bertol

 

Je viens de passer Plan Bertol et me voici seul au monde…  il est presque midi.

La trace sous mes skis devient plus chaleureuse, le ronronnement régulier de mes peaux sur la neige calment mes pensées et m'entraine dans une parade festive et tourbillonnante de la montagne.

Des micros particules argentées flottent dans l'air, ces particules de neige qui dérivent au gré des courants et qui jouent avec le soleil devant mes yeux sont un enchantement.  Je cherche la main invisible qui répand ces graines dans le ciel sans jamais la voir.

Mon esprit commence à me jouer des tours, Mon regard s'arrête sur les belles choses de la vie, dont font clairement parties les "Douves Blanches" qui me fouettent le regard par une immense arrête coupante et profilée qui déborde du vallon pour me boucher l'horizon.

En étant seul, je peux laisser aller mes émotions pour vivre le moment plus intensément.

L'horloge de la vie devient inexistante et lointaine, la trace devient plus accueillante.

Mon esprit tourne la dernière page d'un chapitre enfantin, et la montée me paraît plus amicale. Je perds la notion de l'heure, du jour et de la mort. J'ai assurément l'impression de faire partie de l'univers en prenant une place minuscule dans cet espace infini.

La solitude devient ma confidente.  Comme à chaque fois, la dernière pensée humaine qui me vient à l'esprit c'est. 

- Est-ce que j'ai ma frontale dans le sac ?

Pourquoi je pense à cela avant d'ouvrir la porte ?  Je n'en sais trop rien mais cette pensée devient systématique.

Est-ce que j'ai peur de sauter dans l'inconnu ou au contraire j'ai peur de vouloir y rester ? j'aurais certainement la réponse le jour où je quitterais le chemin pour aller trop loin !

 

Dès ce moment, je peux aller n'importe ou... et encore plus loin.

Qu'importe le dénivelé ou la longueur de la course. Chaque minute passée et une minute de gagnée sur la vie. Il me suffit de prendre le temps de l'accompagner et de la suivre jusqu'au bout de la trace.

 

Je passe la première moraine sur une neige fragile et ensoleillée. Les cairns sont là pour me guider.

La pente prend de l'ampleur et le col se rapproche trop vite.

Mon pas devient moins fluide et moins long.  Mon souffle devient plus rapide et plus saccadé.

Le passage de la rimaye est toujours un moment intense qui sait me remettre à ma place...ou j'ai l'impression de vivre une aventure exceptionnelle même quand elle est presque insignifiante.

L'arrivée au col ferme le chapitre de cette ascension et me découvre une nouvelle histoire bien reliée dans du papier de velours.

 

Dent-Blanche et Tête Blanche au loin.  

Entre-deux le Cervin qui perce la neige du glacier de Ferpècle comme une pyramide que la vie a déposé ici par hasard…  Près de la grandeur du ciel et des rapaces, si près du bout du monde que les premiers filaments de la voie lactée semblent effleurer l'horizon.

Je respire la haute montagne, celle qui m'attire, et celle qui me fait peur. Les glaciers devant moi sont ravagés par l'été passé, les crevasses sont énormes et les ponts de neige presque inexistants.

C'est un autre monde que je peux voir en entrouvrant le rideau d'une scène exceptionnelle… je ne suis que le figurant d'un spectacle immense qui me laisse sans voix.

 

Le silence est assourdissant… et presque lourd.

Arolla me paraît si loin que j'en viens à me demander si le village sera toujours là à mon retour.

Je m'assied sur mon sac et mange mon sandwich en regardant l'horizon découpé à l'ouest, près du Pigne. Une ribambelle de sommets s'exposent à mon regard aminci par l'éblouissement du soleil.

 

Je salue et m'incline devant le Mont Collon en voisin, pour lui montrer ma sincérité et ma sympathie. Il me faudra un effort terrible pour prendre la décision de redescendre… Comme disait Fred "quand tu connais ce monde, tu es atteint"

 

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4 décembre 2022, Pointe de Combette

 

Quand le brouillard t’enveloppe, ton égo s'atrophie et ton chemin disparaît. L’horizon n’en est plus un, la verticalité est complètement chamboulée. Les spatules de tes skis sont les repères ultimes pour rester debout avec la tête en haut. D’une seconde à l’autre tu es perdu, un point c’est tout. Circulez, il y a plus rien à voir !

Inutile de connaître la course, la vallée ou de savoir ou est le Nord. L’été tu peux voir des cailloux connus ou que tu crois connaître mais l’hiver, sur son manteau blanc et immobile, tu es presque… mort…

Il y a une dizaine d’année, je me suis fait prendre par le brouillard sur le glacier de Cheillon, seul, sans GPS ni boussole. Lors de la première minute, tu penses pouvoir t’en sortir en visant la chaîne de montagne qui a disparu de ta vision mais après 5 à 10 minutes, le baromètre de ta vie c’est cassé la figure de moitié ! et après 15 minutes, tu es d’accord avec ton baromètre !

Aujourd’hui j’aime ce moment intense ou le brouillard s’insinue dans ma vie de l’hiver. En une seconde ma concentration se multiplie infiniment jusqu’à la totale plénitude. La solitude n’est plus factice, elle devient réelle et intense. L’instant présent devient impératif et t’enlève toutes autres pensées inutiles et moribondes.  Il n’y a que lors d’atterrissage en delta par conditions extrêmes que je retrouve cette situation si intense que tu en oublie le monde qui t’entoure. 

 

Grâce aux applications comme White Risk et au GPS, le brouillard devient ami et confident. Je lui parle gentiment pour lui montrer que j’ai de l’affection pour lui. Il faudra faire attention aux falaises qui t’entourent, aux crevasses qui se fondent dans le blanc de l’environnement mais sauf si la tempête devient hurlante et le froid mordant, tes chances de survie sont réelles et donnent à ta vie cette petite dose d’adrénaline qui remonte ta colonne vertébrale et qui inonde tes sens.

Ce dimanche, dans ce magnifique haut Val ferret en direction de la pointe de Combette, c’était Noël avant l’heure. Même si j’ai dû tracer 1000 m sur 1200 j’ai pu constater une fois de plus que la montagne pardonne.  Je crois que c’était Messmer qui disait que la montagne n’était pas belle mais dangereuse… OUI presque d’accord avec lui mais j’ai tellement vu de miracle en montagne qu’elles devraient toutes s’appeler « Lourdes »

 

4 Britishs qui me dépassent comme des boulets de canon, casqués comme Ben-Hur sur son char et me disent qu’ils vont faire le Grand Golliat avec un sourire de champion du monde de freeride gonflés à l'hélium.

Me voilà dubitatif… Il y a déjà plusieurs minutes que de grands Vraoums m’entourent de failles impromptues. J’avais déjà renoncé dans ma tête à descendre le couloir Nord du Grand Six Blanc à cause de ces cassures qui ressemblent pas mal à des champs de mines entre Kiev et Moscou.

En principe je me la coince mais je n’ai pas put retenir mon sourcil de partir aux fraises !  Les spécialistes du chiken pie et de la sauce à l’orange sur rosbeaf me firent un grand smile et partirent  d’un pas shakespeare-rien rejoindre l’oracle de leur saison. Le premier descend traverser le ruisseau qui coupe sa route décidée et là… grand méchant, je me retiens franchement de lui dire que ce n’est pas une bonne idée !

Badaboum, la neige cède sous son poids et il finit chiken mouillé jusqu’aux cuisses. Ses three potes lui sauvent sa journée et le remontant presto rejoindre la neige ferme. C’est là que le miracle de la montagne sonne le gong de la chance. Après de multiples jurons et une panoplie de hamburgers à la gelée de fraise et foie gras, ils décident de redescendre faire le plein de leur Range Rover… OUF me revoici seul au monde et unique responsable de mon destin…

 

5 minutes après, le brouillard m’investi gentiment, froidement, sans prévenir. Gèle ma barbe de 2 jours et mes sourcils en broussaille.  Brouille ma vue et hypothétique mon but. Même avec une application pour ne pas me perdre, il me faut aussi rester vigilant sur le parcours qui slalome entre les plaques à vent et qui ne demandent qu’à gaver mes naseaux de blanche poudreuse.

Le temps disparaît de ce monde, les minutes filent se perdre dans les gouttelettes en suspension et je retrouve enfin cet état qui m’inspire tant.

J’aime la montagne pour ce qu’elle m’apporte de plus brut. De plus sauvage et de plus enrichissant. Le brouillard entraine la focalisation de mes décisions et j’avoue humblement adorer ces instants.

Les deux heures qui suivent resteront une image privilégiée de cet hiver naissant… et cerise sur le gâteau, 150 mètres avant le sommet le point de rosée permettra aux gouttes de s’évaporer dans l’atmosphère.

Et un trou genevois (de bleu, de bleu) apparaîtra dans les nuages qui enveloppent le sommet de la pointe de Combette.

Une harassante journée qui restera gravée sur les tables de ma vie.

 

A plus.

Sommet
Sommet
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13 novembre 2022

Depuis quelques années, l’invention du vélo fainéanticulaire favorise et prolonge la saison d'hiver. Le changement climatique n’a qu’à bien se tenir, rien ne saurait monter plus haut et plus vite que le vélo avec un plein de watt.  (A part l’hélico mais ça c’est nul, ça fait un boucan d’enfer et ça chlingue)

 

Une belle soirée chargée avec Esprit-Liberté le jour d'avant ne m'empêchera pas d'enfourcher à 8h00 ma bécane avec mes 4 cannes sur le sac… (Bon comme t’es pas réveillé plus que moi, je cite : 2 bâtons et 2 skis font quatre, je le sais depuis mon école primaire)

Bref, après une petite heure de consommation solaire… (Parce que mon billou, il est chargé avec du silicium chinois) je chausse mes "Movement" de la boîte à semelle

J’me tape 400 m de déniv sur un chemin presque sans neige,  mais ça fait un rude bien de sentir sous les semelles le glissement sensuel d'une neige pourrie.  D'accord, mes skis seront hors d’usage vite fait en redescendant mais j’m’en fous complètement car c’est des vieux skis qui sentent le renfermé, le vieux fart, la vielle graisse de fixe et les restes de mon sandwich d’il y a une année…

Arrivé au col de Gentiane sous le gros cube de béton tout moche par lequel il sort des câbles pour remonter les touristes champions du monde de freeride, j’entame la descente sur le glacier du Mont Fort…  Le pauvre a bien perdu 3 à 4 mètres des ..      paisseurs.  

 

Je continue mon amical chemin sur cette neige presque fraîche en zieutant les crevasses à droite et les crevasses à gauche.

Au milieu, Télé Verbier m’a tracé une jolie ligne toute bucolique pour m’éviter une chute fatale dans le passé… composé… de glace... de l’époque où j’étais pas encore né !

 

Après quelques péripéties pour mettre mes couteaux (que j’ai retrouvé dans le sac de mon sandwich de l’année passée et qui sentent bon mes chaussettes après 1 semaine de cabanes) je me tape un long détour pour circonférencier (Larousse 2035) la longue rimaye en passe d’être bouchée par les pelles mécaniques si Rome antique dans cet agréable paysage si bucolique…. T’as rien compris ? bois un génépi !

Tu vas pas me croire mais curieux comme je suis, je n’ai pas "pute" m’empêcher de monter sur la nouvelle passerelle du sommet.  Et ça c’est du travail bien fait, tu devras absolument y monter pour voir cette œuvre d’art,  des cailles blotties en métal galvanisées qui défient les lois de la gravité. Einstein disait que la folie était de toujours faire la même chose et s’attendre à un résultat différent.  Ben il avait raison, l’humain fais toujours les mêmes conneries pour arriver à faire toujours du moche !

En haut c’est la tour Eiffel et les Champs Elysée réunis, s’il y avait eu un gendarme à un passage clouté, j’y aurais presque pute demander mon chemin tellement que ce fute grand !

C’est en foulant cette orgie de l’humain que le gypaète barbu du Val de Bagnes sort du ciel par surprise et s'approche de moi.

Habile et majestueux, il enroule le thermique sans prendre garde au tableau géant du monde qu’il survol.  Il m'effleure à moins de 10 mètres, qui… comme St-Pierre sur son nuage prend le temps de ne pas me regarder.

Mes sens s'atrophient et me laissent sans geste et presque sans voix, je reste immobile comme un tableau de Hodler dans le salon de Blocher.

Serait-ce un cygne ?  Non, juste un gypaète.  A ce moment précis, le ciel s’embrume dans mes lunettes de soleil, surpris, je regarde l’horizon, mais le ciel est d’un bleu pur, si pur haut oh ! oh!

Je sens des larmes couler le long de mes joues.

Les vraies larmes arrivent toujours sans prévenir. Comme un champ d’étoile qui tapisse l’horizon quand tu arrives au sommet de la montagne par la face Nord, juste avant le levé du jour.

Me voici le témoin privilégié de cet instant magique, j’en perds le fil de ma respiration haletante. Mes genoux flanchent des rotules. Mon cerveau se brouille comme un oeuf, ma gorge se noue comme un pendu et mon plexus perd la moitié de son volumus...

Et là… tu vas de nouveau pas me croire, mais le paysage me saute aux yeux comme un ballon de basket qui rebondi plus haut au deuxième soubresaut... enfin tu vois ce que je veux dire !

A chaque fois je me sens plus petit devant tant d’exclamation,  Je tends les bras timidement... et j'effleure doucement le ciel de mes doigts froids

Je le respire profondément et passionnément.

Mes yeux embués inondent mes sens et apaisent mon esprit.

Je reste un minuscule témoin solitaire de la beauté du monde. 

Un presque rien de l’univers qui ne peut s’empêcher de dire merci devant tant de grâce.

Chaque jour nous rapproche de la mort, mais les jours en montagne te renvoient avec bonheur sur l’étage supérieur de la vie. Ou ton esprit libre rejoint la poésie.

 

Vidéo:

https://www.youtube.com/watch?v=l1DyD-Ni16A&ab_channel=PassionMontagne

 

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Sur le chemin, Je lui ai dit bonjour,

Elle m’a dit… Salut.

 

Je lui ai demandé qui elle était ?

Elle m’a pris pour un plouc. 

Je lui ai parlé du monde.

Elle m’a parlé des couleurs d’automne. 

Je lui ai parlé de l’humanité.

Elle m’a parlé du soleil… et du vent.

 

Je lui ai demandé si elle connaissait la forêt.

Elle m’a répondu qu’elle avait peur de l'orage.

 

Je lui ai demandé si elle avait peur du loup.

Elle m’a regardé tendrement...

 

Je lui ai dit… Salut

Elle est repartie dans son monde…

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17 septembre. Glacier d'Otemma.

Regarde bien cette eau, c'est une eau fossile, vieille de plusieurs milliers d'années. Depuis son arrivée au monde il y a 4.5 milliard d'années...  en passagère clandestine d’une météorite, elle n’a cessé de se transformer.  

Tantôt gazeuse, tantôt solide, tantôt eau de boisson, élément de vie d’une cellule humaine ou particule gazeuse d’une masse d’air.

Elle se déguise en chute d’eau, en vin, en nuage, en humain, en cerveau ou en urine. Elle est présente partout, même dans les déserts.

 

Cette goutte qui retrouve la vie en sortant du glacier d’Otemma après quelques milliers d’années de repos solide et froid, va redevenir libre et frivole.  Son cycle recommence avec aisance. 

Avec toutefois de légères différences auquel elle devra faire face prochainement.

La pollution débordante des airs.

Mais elle devra aussi se frayer un passage dans des millions de tonnes de déchets et d’ordures ménagères qui saccagent la vie sur terre. Elle devra également s’accommoder des milliards de nano-particules de plastique qui jonchent les rivières, les lacs, les glaciers et les océans au bord de l’asphyxie. Elle devra supporter la pollution chimique à l’excès.

 

Elle devra faire face aux politiciens qui détournent leur regard à la vue de cette si fragile goutte transparente et insignifiante... En faisant un maximum pour oublier qu’elle est indispensable à la vie sur terre et quelle a fait naître nos enfants.

 

Il a fallu que j'assiste à ton retour, au paradis perdu du haut Val de Bagnes sauvage. Presque à l’abri de la vie humaine. Au régime minéral,  lent et authentique.

Ne soit pas trop pressée de rejoindre les turbines de la Dixence car après… rien ne sera comme avant.

 

Bienvenue en enfer... ta mort sera une délivrance !

 

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Mont Gelé (le vrai) 3518 m.

 

La passion-montagne en pleine ambivalence climatique.

C’est dans un décor de carte postale que je poursuis ma quête de tous les sommets du Val de Bagnes. Une des plus grandes communes de Suisse mine de rien, et son principal atout reste des sommets sauvages et relativement peut courus.

Perdu tout au fond du haut Val de Bagnes, le vallon d’Ayace (ou crête sèche) coche toutes les cases de mon EMS préféré.

Comme tout lieu idyllique, le lac du vallon, reste un oasis de calme et de tranquillité. Il fait face à la Tsouma des Boucs et au Bec d’Epicoune, avec dans son dos la pointe d’Ayace, plus verte et moins sensible au temps géologique.

Le lac légèrement en retrait du carrefour du vallon d’Otemma, à 2550 mètres a pris naissance lors du recul de l’ancien glacier de Crête Sèche. Le glacier en retrait depuis 1850 a laissé la place à cette boursouflure morainique couverte de génépi blanc.

C’est sur le rivage du lac que je plante ma tente ce vendredi soir après le boulot. Juste le temps de me faire une petite fondue avant la nuit qui commence à tomber plus vite avec l’arrivée de cette fin d’été.

Pas une âme à des kilomètres, un calme absolu et enchanteur ou le temps ralenti au rythme particulier de la rotation du soleil. Ici pas de montre ni de rendez-vous. Le temps est plus lent, plus vivant, plus prenant, plus serein.

Peut être finalement, comme la vie d’un enfant. Ou comme les dernières minutes de vie d’un vieux bouquetin qui se couche une dernière fois en regardant le Grand Combin pour mourir.

Pas de réseau, pas de mauvaises nouvelles, tu commences à prendre le temps d’oublier la vie d’en bas en regardant la clarté naissante du lever de lune derrière les aiguilles des Boucs. Les étoiles sont plus grandes, plus lumineuses et scintillent au rythme du vent d’altitude pour te donner encore plus de force.

La nuit s’annonce pourtant chaotique. Les torrents rugissent de partout, la brise frappe les parois de ma tente violemment, le léger dévers rend ma nuit glissante et la petite motte que je n’ai pas enlevée fait de mon vieux dos une marmelade.

Inutile d’essayer de dormir plus longtemps, au lever du jour, je me fais un petit riz au lait lyophilisé qui me va à merveille. J’ai pas la grande forme et la motivation en pâti.

A 6h30, je charge mon sac à dos sans grande énergie et je me dirige péniblement plein Sud en direction du col de Crête Sèche. Mon pas ressemble franchement à celui d’un résident d’EMS qui essaye de rejoindre son fauteuil à 2 mètres de son lit dans un effort surhumain.

Après une heure de souffrances et de doutes, le rythme devient raisonnable et la montagne devient plus belle et accueillante.

Au col, le soleil de l’Italie me prend de toute sa fusion climatique apocalyptique et j’égrène les couches. Une brève redescente dans le vallon et je prends la voie hivernale pour monter en direction du glacier de l’Aroletta. Itinéraire fortement exposé aux chutes de pierre, j’ai l’impression d’être la quille d’un bowling qui attend l’arrivée des joueurs.

 

Ancien plateau glacière, 2 petits lacs se sont formés pour donner un peu de couleurs dans cet endroit magnifique, je croise les deux premières personnes de la journée en montant au col du Mont Gelé à 3144 mètres d’altitude. Cela fait 3h30 que je suis parti et la soif devient insistante malgré le remplissage de ma gourde à tous les ruisseaux possibles.

 

Au col, j’étudie le cheminement possible pour affronter le sommet de la meilleure des façons mais j’hésite franchement entre deux variantes. Je demande mon chemin à un bel italien montagnard, musclé, avec la tête et le look de Claude Rémy des années 70-80 qui redescend du sommet piolet à la main et crampons aux pieds. Il m’envoie en direction du col de la Balme !?  C’est pas la première fois que je me fie à des locaux mais là je vois bien qu’il y a un lézard.  L’arrête entre le col de Balme et le sommet me paraît infranchissable en solo, mais d’expérience ce qui me paraît infranchissable de loin peut s’avérer étrangement facile quand on est sur place. Donc je décide de suivre les conseils du Messmer des cimes en pleine déscension du K2.  ( Larousse a certainement oublié le mot)

Comme je n’ai pas pris mes crampons pour affronter le terrible glacier du Mont Gelé en face Sud, je longe la rive gauche au pied du Mont de la Balme. Exposé aux chutes de pierres qui jalonne le glacier de partout. Plusieurs crevasses sont présentes à mon grand étonnement.  Les chutes de pierres ont l’avantage de laisser beaucoup de résidus de sables sur la glace et favorisent une ascension légère et en sécurité.

Arrivé au col, il me reste environ 150 mètres sur des rochers relativement bien dans leurs peaux et pas craignos du tout. Malheureusement je devrais me contenter de l’antécime à 3442 mètres. L’arrête est hors de ma portée techniquement et clairement tout le monde s’en contente.  En fait, le chemin normal traverse le glacier pour attaquer le sommet par-dessous.

La vue gagnée avec ma sueur reste à la hauteur de mon imagination. La clarté du ciel, les géants des Alpes, l’éternel stratus sur l’Italie. La vue du plus bas depuis tout en haut, Le Vélan en pleine lumière et le Mont Blanc toujours aussi blanc.

Il est 11h30 et les chutes de pierre résonnent de partout ! Etrangement les principales chutes de pierre sont sur les faces Nord. Certainement que le pergélisol a déjà fondu depuis belle lurette sur les faces Sud.

Les bowlings ayants ouverts, j’ai renoncé à mon raccourci dans la descente en préférant le chemin normal sur Crête sèche. Malheureusement le détour n’en vaut pas la chandelle, j’étais aussi exposé aux chutes de pierre et je dois me taper 300 m. de déniv pour remonter au col sous une chaleur de Sahara, sans eau et à bout de force.  La longue descente pour rejoindre mon bivouac sera un peu plus rapide mais j’arrive à 16h30 à ma tente. Je bois la moitié du lac pour ne pas tomber en poussière mais suis obligé de laisser un peu d’eau aux truites prisonnières d’un paradis qu’elles n’ont pas demandé.

Tout cassé, je plie ma tente après une rapide sieste et me tape encore ¾ d’heure de vélo pour rejoindre Mauvoisin.

 

Il est difficile d’expliquer cette passion qui dévore.

La beauté de l’environnement, la solitude ou la sérénité. Peut être aussi la prise de risque, l’effort, la fierté d’arriver au sommet. L’ouverture sur un ciel limpide. Les connaissances acquises de la montagne qui sont un enrichissement personnel fabuleux, la préparation des courses les jours avant ?

 

Toujours est-il qu’après une course comme celle-là, je me sens vide et pas pressé d’y retourner. Pour être franc j’en ai vraiment chié lors du retour, le lendemain je marche comme un pingouin et je dois bien avouer que l’hiver me va nettement mieux.

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LA MORT EN MONTAGNE

C'est par une douce soirée,  en apprenant la mort d'un alpiniste au grand Combin.

C'est en observant vaguement le Mont Rogneux juste avant le crépuscule. En regardant le temps s'allonger un soir d'été. Depuis le si calme et reposant village de Sarreyer que cette montagne devant moi s'enfonce lentement dans une ombre toute relative. Elle prend sont temps, paresse et fait la grâce soirée. Jusqu'à devenir sombre et imposante, elle se tasse sur elle-même pour se reposer.
La gardienne de Valsorey doit encore une fois de plus se demander pourquoi une vie s'arrête si près, tout là haut, juste là.
Toutes les victimes des cimes ont commis le pêcher mortel de vouloir se rapprocher du ciel.
À l'ouest du Becca de cery. La première étoile s'allume. Scintille et danse pour la vie comme l'arc en ciel après la pluie.
Un voile de cirrus s'installe dans le ciel empêchant les autres étoiles de briller.
Tous ces morts, toutes ces victimes qui sont parties très tôt le matin avec la joie dans le corps, et qui ne sont jamais revenues.

Funeste destin pour ceux d'en bas. Ceux qui ne comprennent pas cette incompréhensible attirance .
Justes des passionnés de l' inutile prêt à sacrifier leur existence pour y monter une dernière fois, pour effleurer le ciel avant de le rejoindre.

Pour essayer de comprendre cet appel qui attire comme un aimant, prêt à laisser femme et enfants dans la douleur. A sacrifier l'avenir pour un intense présent.

D'un coup, la mort te prend par la main et t'emporte dans une chute ultime.
Tu peux en souffrir...

Y être insensible...

Ou tout simplement regarder le jour qui s'éteint...


Dans un calme absolu et le regard paisible. Cruellement vide.
Le Rogneux ce fond avec la nuit, son ombre a disparu dans le noir et le chant de la Drance s'amplifie et prend toute la place dans le silence de la vallée.
Et je rêve déjà... au sommet que je ferais demain. 

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 9 juillet Bec d'Epicoune

 

La nuit tombe sur le haut val de Bagnes, La mémoire du monde ne dure qu'un instant, mais l'ombre de la pointe d'Ayace reste encerclée d'une armée d'étoiles. Les filaments de brume s'enlacent  et se prélassent avec insistance sous les sommets de la vallée. Mes sens s'évaporent  au son du glacier d'Epicoune qui se précipite au fond du vallon. Toute la nuit le torrent du glacier rugira de plus belle en maudissant ce zéro qui résiste à plus de 4'000 m.

Otemma, le cousin d'Epicoune. Glacier pris en sandwich entre l'Aouille et la pointe des Portons ne peut s'échapper de la chaleur des montagnes. C'est un géant fragile, prisonnier du monde et de l'humain. la trace du monstre est encore visible 400 m. en-dessus de son lit actuel. Il ne cessera de crier sa souffrance tout au long des deux jours que j'ai passé à son chevet.

L'été 2022 est de loin pas fini mais sa trace restera indélébile jusqu'au crépuscule de l'histoire des montagnes.

A quoi bon escalader ces sommets en fin de vie si c'est pour voir leur souffrance. Epicoune ne m'en tiendra pas rigueur et ma laissera fouler son bec de la plus belle des manières. Avec ferveur et passion.  

 

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12 juin sur les skis au Mont-Fort

 

Il était impossible de passer l'été sans remettre mes spatules en "Movement".

Grand bien m'en a pris avec des conditions justes parfaites. A 9h00 la neige était encore dure... à regretter mes couteaux.

Parqué la bagnôle devant le Jumbo de la Chaux et monté jusqu'au col des Gentianes en VTT... (de fiotte électrique).

1 heure de vélo et 1 heure sur le magnifique glacier de Tortin pour aller revoir cette vue improbable depuis le sommet. Pas âme qui vive en haut, 3 bouquetins au col pour me souhaiter la bienvenue chez eux. Pays bienheureux quand il est oublié du monde et de ses habitants.

La montée fut un régal de douceur et de glisse sur une neige dure à très dure.

La descente sur la pentue pente NO était bien moquette à poil ras en haut, moquette bien molletonnée au milieu et tapis de velours sur le bas... comme un mois d'avril en fête!

Pourtant on frise les 30° dans les vignobles des côtes du rhône valaisannes. 

Bref, la journée était belle mais il faut quand même avouer que les installations touristocratiques câblées partout dans le ciel sont franchement moches en été... et je suis poli !

à plus

 

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4 juin

La Tournette t’embarque dans un tourni fabuleux. La ballade des gens heureux. Les bouquetins se lassent de ton passage, Ils se prélassent du temps qui passe.

L’herbe rase et bien grasse s’encanaille avec l’éboulis et le granite. Le chemin comte fleurette à la sente en lui offrant une gentiane bien juvénile, à la verte tige et au ventre bleu et bien rond.

Une belle histoire, ou l’horizon s’embrume avec le bleu du ciel, le vert fond avec le turquois des rizées d’en bas.

 

Le soleil s’allie à tes rêves d’infini. La promenade qui t’emporte 1200 mètres plus près du ciel, sur le fil du temps et de l’espace. Les mollets durcissent en passant de l’hiver à l’été, le sac s’allège et ton pas s’accélère.  Que c’est bô tout la haut

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17 avril  1700 m D+

 

Un petit passage sur le glacier de Corbassière pour profiter de cette neige qui commence à tirer la langue.

Chaude journée mais tellement belle. Ce glacier est magnifique et relativement safe pour ce printemps qui reste difficile à gérer au niveau des crevasses.

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4 avril. Petit voyage au paradis de chez nous   600m D+

 

4 jours prévus dans le massif du Mont Rose à l'origine d'une discussion de bistrot.

Dates réservées, cabanes organisées... crevasses trop désordonnées.

Le peu de neige me décourage d'aller au pays de Castor et Pollux avec mes deux blondes. Les conditions trop "viriles" auraient pu effrayer les marmottes des villes mais aussi rendre le trip des dames... "drame à tique"

Mieux vaut rester humble avec nos 4'000 pour mieux les apprivoiser en 2023.

La région d'Arolla est toujours aussi avenante et tentante, même si pour cette fois  ce sera une roue de secours.

Nous voici au sommet du téléski d'Arolla parce qu'on aime bien tricher et se la faire belle de temps en temps.

Nous croisons 1 couple ultra expérimenté de la montagne en provenance de Grenoble avec un jeune homme fort sympathique que nous n'arriverons pas à semer durant les 3 prochains jours.   

Les échelles du Pas de Chèvre restent la porte du paradis des Dix. Nous traversons ce qu'il reste du glacier de Cheillon et grimpons vers les bières de la cabane des Dix sous un soleil d'avant été.

L'accueil toujours aussi chaleureux de Daniel qui bosse, qui cuisine, qui gratte (sa guitare), et reste le maître du lieu mythique de Tête Noire avec le sourire et le sens de l'homme de la montagne version 21ème siècle.

La journée tellement belle annoncée ne s'est pas défilée. Si on avait été moins fainéants nous aurions pu monter à la Luette pour se conter fleurette mais la blanche des Dix nous a mis le grappin dessus vite-fait ! 

L'ambiance du soir autour de la soupe reste plus morose que le Mont Rose. Le sujet principal de toutes les tables tourne autour des crevasses du Pigne à la montée comme à la descente sur les Vignettes. Notre course du lendemain restera un lendemain qui déchante et nous décidons de garder la corde du mardi dans le sac en réservant la cabane de Chanrion. Une bonne nuit de ronflette nous tant les bras d'un morphée taquin... comme d'hab.

Un poil d'histoire ci-dessous: la carte de Siegfried 1870 comparée à celle de nos jours gracieusement empruntée à l'office de la topographie que je vous conseille vivement d'aller visiter.

On remarque que le glacier de Cheillon allait jusqu'à l'actuel lac des Dix (Durand de Seillon). Le glacier de  Zigiorenove de l'époque (Tsijiorenouve) allait lécher le mayen d'Arolla, que le glacier de Pièce de Torgnon (Glacier de Pièce) allait plus de 400 plus bas qu'aujourd'hui. Que le Glacier d'Arolla finissait presque 4 kils plus bas qu'aujourd'hui pour 370 m de déniv.

Ce qui ne me permet pas d'accuser le réchauffement climatique pour autant. Le petit âge glacière en était le responsable de l'époque et aujourd'hui les glaciers reprennent leur place d'il y a 2000 ans environ. Par contre l'emballement de l'augmentation des températures actuelles reste considérable et nous dirige tout droit dans le four !...

 

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5 avril en vacances sur la route de Chanrion par les 3 cols

 

Matin brumeux après le bircher des Dix.

Le Cheillon reste voilé du chapeau tout en nous montrant qu'il reste le gardien du temps d'ici, du temps du demain et de l'au-delà. Montagne impressionnante, solide comme le roc au son du rock de la cabane des Dix. Son glacier supérieur restera encore longtemps vivace, à l'image d'un musée d'histoire à l'abri des citadins.  Le col de Cheillon reste une porte ouverte sur le magnifique glacier de Giétroz. Le vent de sud et du nord se disputent le temps en jouant avec les nuages. Le brouillard peut devenir un criminel destructeur quand le foehn serré des isobares se laisse aller dans sa colère hivernale.  Le glacier de Giétroz comme centre du monde des zuzumanoïdes, reste un lieu privilégié de méditation et d'admiration blanche qui te prend les trippes jusqu'au plus profond de ton âme.

A son retour, la vie te paraîtra futile comme après l'achat consumériste du dernier iphone qui forcément t'apportera rien d'autre que du vide deux jours après son achat.

Il est long le glacier de Giétroz, et sa longueur dépend de ton pas... de ton rythme... de ton souffle... et de la météo mais forcément sa longueur ne t'apportera que bien être et satisfaction.

Un petit saut au sommet du Mont Rouge nous propulse vers un abîme incroyable sur le lac de Mauvoisin. Le haut val de Bagne reste incroyable dans sa simplicité sauvage et rustique.

La descente du col du Mont Rouge est un couloir cartonné à 45° qui fera chauffer les cuisses mais qui t'ouvre la porte sur le vallon de la Lyre Rose, hors du temps.

La remontée sur le col de la Lyre Rose reste courte mais rude avec ces conditions du jour.

La descente sur le vallon de Brenay nous ramène de jolies conditions printanières avec du ski agréable jusqu'au fond de vallée 450 mètres plus bas. Il nous restera qu'un défilement de paysages morainique parsemé des premières fleurs et de neige à l'agonie, au presque chaud  soleil jusqu'à la cabane de Chanrion.

Cabane nouvellement rénovée grande classe avec douche, eau courante et confort luxueux. Les nouveaux gardiens sont un exemple de  fraîcheur et de sympathie.

le génépi coule à flot dans nos veines, dans nos coeurs et jusque dans nos rêves...... 

le 6 avril  Chanrion-Arolla par le col des Vignettes.

 

Chaussage des skis avec le soleil qui couve le Grand Combin et qui nous amène dans la combe du ruisseau d'Otemma.

Passage de la prise d'eau aux couleurs des cascades de glaces de la combe de Crête Sèche. La longue remontée du glacier d'Otemma reste monotone mais le temps ralenti à mesure que ton pas prend le rythme de l'altitude. Le Bec d'Epicoune ouvre la porte droite de l'Aouille Tseuque, du Grand Blanchen et de la Singla jusqu'au glacier du Petit Mont Collon.

La pointe d'Otemma t'ouvre la porte gauche de la Pointe des Portons et de la Pointe de Brenay. Entre les deux, la rivière lente et languissante du glacier d'Otemma n'est pas pressée d'aller se réchauffer au soleil du bas... Y a rien qui presse finalement. 

Arrivés au col de Charmotane, la pente raide et pas avenante du tout nous oblige à prendre des pincettes pour déranger le moins possible cette neige prête à tuer !

C'est après plus de 5h00 de montée que nous arrivons au col des Vignettes ou le pic nique s'impose.

La descente sur le glacier de Pièce nous dirige tout droit sur Arolla ou le thermomètre accuse un réchauffement diurne plus qu'important en cette journée d'avril. c'est quand la prochaine ??

A plus

 

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3 avril sur le spot secret 1200 m D+

 

Inespéré mais il faut prendre quand c'est tout chaud, comme les pains au chocolat. Dud-dur la trace.

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3 Avril...  Le retour... enfin
3 Avril... Le retour... enfin

Le 26 mars  Mont Rogneux depuis Champsec en passant par le col de Mille et l'arrête Ouest 1970 m D+

 

Je pars de Sarreyer pour Arolla et je prends à gauche à Champsec ! :)  Y a des fois, faut pas se poser trop de question. Mes mains prennent des initiatives sans en toucher mot à ma cervelle pleine de vapeur de génépi.

Bonne nouvelle, je dois marcher 40 minutes dans les crocus avant de mettre les skis, Les oiseaux chantent à tue-tête... moi j'me tue les pieds et le manque de neige me tue tout court.

J'fais tout faux ce matin. je prend le chemin du bas et j'me retrouve tout en bas ! va falloir remonter les anciennes moraines de l'ancien glacier du Rogneux par une pente de 30° à grand coup de conversion. Mais au moins j'ai une vue magnifique sur ce qui m'attend... et ce sera pas de la tarte au pomme de Brunet.

Je me traine sur le faîte de la moraine en cogitant sur la droite ou la gauche et je pars au milieu sans passer par le col de Mille.

J'arrive à 2600m sur la crête qui mène au Rogneux et le vent de Sud me susurre d'enfiler mes gants, mon coupe-vent et de troquer ma casquette contre un bonnet. Décidément la suite me paraît peu confortable, c'est la première fois que je passe ici et le manque de neige rend la trace précaire, voire carrément craignos sur certains passages. J'insiste à passer les encoubles avec mes skis au lieu de tracer sur l'arrête à pince. Je sors même mon piolet du sac pour m'assurer et surtout pour me rassurer. J'en mène pas large et la fatigue commence sérieusement à me fatiguer. D'habitude je suis presque infatigable mais sur ce moment, j'en perd mes habitudes. Il me reste 350 mètres et je me suis toujours dit que quand il me reste moins de 300m, je n'ai pas le droit d'abandonner. Donc je me violente l'esprit pour faire encore 50 mètres ce qui m'oblige de facto à finir cette ascension.

C'est pas le moment de regarder le paysage, ni la vallée d'Entremont d'en plus bas.

Pas le temps de penser aux marmottes, aux edelweiss et à cogiter sur la vie d'en bas.

Je regarde droit devant moi, j'use de mes couteaux sur la glace, de mes peaux de phoque sur l'herbe rase et de mes bâtons pour garder l'équilibre.

Je me vois difficilement redescendre par le même itinéraire mais il est hors de question que je redescende par Brunet. Faudra bien que je trouve un passage dans la face Nord un point c'est tout. 

Je bisouille la croix du sommet, seul comme d'habitude mais je vois pointer sur l'arrête Est quelques zumains au taquet avec la tête dans le chrono ! Il est exclus que je réapprenne à parler l'homo sapien pour parler de la pluie et du beau temps.

J'en profite pour me défiler par la porte de derrière et retourner à mes skis que j'ai laissé une vingtaine de mètres sous le sommet.  Je ruppe une barre chocolatée avant de m'enfiler sous l'antécime en face Ouest, par ou je suis venu sur 150 m. et j'entrevois un échappatoire en face Nord. (que j'avais repéré en montant)

Ma meilleure décision de la journée clairement, même si la face est bien raide et ma fatigue bien présente, je suit une vieille trace ridée et fossilisée de mathusalem qui me guidera tout au long de la longue face Nord.

Au 3ème virage une plaque de glace cachée sous la petite couche de neige rouge me provoque une réelle frayeur mais ce ne sera qu'un avertissement.

La neige n'est pas la meilleure que j'ai eu cet hiver mais reste encore bien gérable. Mes cuisses chauffent dans cette descente incroyable. J'entrevois dans cette face de multiples couloirs, d'immenses possibilités à venir. J'ai l'impression de me retrouver dans un monde parallèle de freeride infini, cela fait plus de 10 ans que je chevauche ce Rogneux en restant à côté d'où il fallait être. J'en aurais pas fait le tour avant bien des années.

J'arrive à la cabane de Servay et je m'assied sur la marche en mélèze. Le temps s'arrête enfin.

Je dis sincèrement merci à cette montagne qui m'a accepté aujourd'hui et je lui explique tout bas que je resterais son ami fidèle encore quelques saisons.

La vue sur les Dents du Midi me rassasient de bien être, de calme, et de relâchement. Mes paupières se ferment dans une clémente somnolence de milieu d'après-midi. 

A plus

 

 

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Le 24 mars  Tremette/Teysachaux ôh ôh!  800 m D+

 

Demi heure d'échauffement à pince de bon matin, ça réveille, ça dérouille, ça gargouille, ça bidouille, ça magouille, c'est bioutifouille.

Le grand air m'abreuve d'air frais à moindre frais. Marcher avec mes skis sur le sac à dos, c'est toujours un moment que j'apprécie. J'ai l'impression de partir à l'aventure XXL... même si c'est à côté de ma maison, sur la face Ouest du Moléson.

Dès le chalet Incrotta, je chausse et ne déchausserais plus jusque ?... en fait je sais pas... mais j'y vais de ce pas !

S'il y a une combe qui me comble, c'est bien l'univers sauvage au Nord de Theysachaux. Pas âme qui vive comme d'habitude, de la neige dure juste comme il faut, ni glacée ni trop cuite, juste à point en somme. C'est d'une grande beauté et j'admire la face Nord de Theysache qui me cligne un oeil aguicheur.  Un gros cailloux de presque 1 m3 a fait du surf il y a pas longtemps sur cette face ravagée pas les dernières avalanches rouges sang.

Je continue sans faire attention au sourire ravageur de cette face Nord, qui comme Ulysse ne me prendra pas dans ses bras, quitte à m'attacher au mât de mon trois mâts !

Je monterais à gauche de Theysache pour arriver au col ou passe le chemin d'été. Je grimpouille sur cette face à presque 50° sans mes crampons en tapant des marches avec mes chaussures à tout faire.

Arrivé sur le faîte étroit et branlant de la corniche sommitale, je chausse mes lattes... donne deux coups de carre pour tâter la tenue de neige et m'enfile dans cette pente bien dure et bien pentue... Je dois reconnaître que la pente m'excite et la douce montée d'adrénaline qui remonte dans mes veines devient malgré moi un mal presque nécessaire ! Au bas de la descente, je ne peux m'empêcher de remettre les peaux pour partir à la découverte d'une autre combe, d'une autre pente, d'un autre sommet, cette fois rasé de près.

Herbe d'altitude, piquante et vivifiante, caressée par le vent du Sud, du Nord et de l'Ouest. Les antécimes restent des cimes après-tout , il y a pas de mal à s'en faire quelques unes, vite avant d'aller bosser...  Cet hiver, ce sera certainement la dernière fois que je partage les mottes dans ce coin de paradis alors autant en profiter !

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Col des Ecandilles, le 20 mars 2022   1300 m D+

 

Avec une neige gelée, croutée, rougeâtre, vieillissante et presque lassante, nous voici à Champex avec une belle brise rafraichissante de bon matin. Une course en principe à l'abri du foehn. Et après quelques rafales à Champex, il faut reconnaître que depuis le relais d'Arpette, c'est le calme presque absolu.

Une vingtaine de personnes sur la course, toujours en dévers... du même côté, juste bon pour casser les piautes, cloquer la malléole et trouer les chaussettes. 

1300 m en 3h00m, sans couteaux mais avec des peaux bien mises à contribution.

Une vue habituelle sur le glacier du Trient, sur le pissoir, les Aiguilles du pissoir et les aiguilles du Tour.  Manquait l'urinoir, la douche et l'eau chaude tout confort au col, pas de bol...

La descente, finalement pas si pire, bien que dure et croustillante. Finalement, c'est le lieu qui compte plus que les conditions. Ce Val d'Arpette reste une belle vallée, été comme hiver.

Pas de réel engagement, pas de dérupe impressionnante, pas de crevasse à portée de bâton, pas de dénivelé de  psychopathe, pas de plus ni de moins et encore moins de rien. Bref une course de papi du dimanche même si on s'est permis une descente avec les stars pour passer à Paju... à non Paju maintenant c'est des sculpteurs, des peintureurs, des rêveurs de la ville, tout sauf des gens de la montagne. Qu'est ce que tu veux, les temps changent !

https://www.youtube.com/watch?v=fi6Cc8pDIYs


Le 8 mars Tremette

Pour s'échauffer pendant le boulot.

Y a pas que ça à faire... quand faut y aller... faut y aller.


Petit Vélan  le  5 mars 2022  1100 m+

Après l'effort... le réconfort.

Petite sortie presque finie  au Petit-Vélan. Couloir Ouest carton avec une belle croute en surface. Visiblement pas l'idéal pour faire le fou dans un couloir à 45°.  Il nous manque 120 m. pour le sommet. On abandonne provisoirement mais c'est certain que l'on va revenir pour finir cette course. La région est superbe.

Un bel arrêt à la cabane de Plan du Jeux en descendant, une petite fondue, une bonne ambiance, un bon gardien et qu'est-ce que l'on veut de plus :) 

vidéo: 

 


Petit Combin à la journée en solo le 2 mars 2022     2300m+            Récit complet

 


26 Février   Le Gros Six  (Bourg-St-Pierre)    1200 m.

 

Une course magnifique dans la combe des Planards.  Partis de Bourg-St-Pierre sur la route du barrage de Toule. C'est 30 minutes de faux plat et 10 minutes pour grimper sur le barrage.  Ensuite c'est que du bonheur même s'il y a peu de neige pour la saison. En trio avec mes deux équipières préférées. Cette longue course reste en-dehors des sentiers de Bourg-St-Bernard. La combe des Planards reste un must sauvage avec des chamois qui nous observent tranquillement pour ne pas nous effrayer. Nous sommes clairement dans le rôle de l'humain toléré par les autochtones. Ambiance sauvage sur le faux plat de la Chaux des Planards. Partis pour redescendre par la combe de l'A jusqu'à Liddes, nous avons renoncé à cause du manque de neige pour descendre sur le col du Névé de la Rousse et l'absence de corde pour assurer mes deux blondes. La descente nous a gâté grave avec des conditions exceptionnelles sur la face Est du Gros Six.


22 Février Merdasson.  650 mètres vite pendant le boulot

 

Encore me diras-tu... Mais cher ami, ce Diable était du meilleur cru.

35 cm tombés la nuit rendait la visite indispensable... la pente désirable et le plaisir incomparable.

Que le grand crique me croque si en 52 ans de pratique sur cette pente... je l'ai rarement vue si plaisante.

 

Le Diable pour moi tout seul, sur le terrain de jeux du paradis. Quoi de mieux que de jouer avec l'un et l'autre :) 

 

2 traces avant moi mais apparemment mes prédédéscendeurs ont préférés la proximité de la forêt pour ne pas titiller la neige fragile du jour... moi j'étais pour... une descente à mach 12.

Mémorable et j'en redemande...

A plus

photos

 


Le 20 Février  Pointe des 3 Lacs (Grand St Bernard) 900 m.

Passage à un degré 2 pendant la nuit sur les faces Nord, j'ai dû remettre le couvert avec mes deux citadins de la veille.  Même si j'étais un peu hésitant de monter cette face avec ses conditions, j'ai fait une coupe avant d'attaquer le bout raide pour me conforter que le choix serait suffisamment safe pour ne pas les dégouter.  Le moindre vroum, la moindre plaque aurait joué en ma défaveur et contribué à les terroriser pour le restant de leur vie ! Comme d'habitude le Monteillier bouchonnait, l'Hospice bouchonnait, Barasson Bouchonnait presque et le parking était plein à craquer comme d'hab ! Et moi qui déteste les bouchons, j'ai préféré déboucher au sommet de la Pointe des 3 lacs avec vue sur les lacs de Fenêtre, le Mont Blanc, le Grand Golliat et la Méditerranée (enfin presque) Seuls au monde en haut, l'ambiance est vraiment "montagne". Les chérubins aux anges et la neige poudreuse à souhait... comme dans les films de Jérémi... ou rien !


19 Février Le Chantonnet

Par degré 3 SLF avec 2 touristes à emmener sur des pentes agréables et qui ne font pas peur, le choix n'était pas vraiment simple. Ce sera au Chantonnet sur la Fouly. 960 mètres pas trop technique, pas trop craignos et surtout presque idéal pour leur donner le goût des cimes !  Le seul bémol était le vent de SO annoncé modéré et finalement il était fort du Nord, avec un froid de canard surgelé sans sauce à l'orange en prime. Les nappes de brouillard sont venues semer la zizanie dans une ambiance fantomatique et taquine. Pour des citadins de la ville, ils sont montés comme des bombes (2h30) :)  Ambiance d'hiver avec une crachée le jour d'avant et un peu de flotte en-dessus de 2'000 m le jour précédent la neige.


12 février    Pointe Kürz depuis Arolla

 

Une des plus belle course à la journée pour une course en solo. J'y suis allé en mai 2021 mais j'étais arrivé au sommet avec un brouillard à couper au couteau. Cette fois j'ai enfin pût apprécier la vue à sa juste mesure... et quelle mesure !

Sur l'Italie, la Dent Blanche, la Dent d'Hérens, le Mont Collon, le Haut glacier d'Arolla et le Grand Combin.

Parti à 9h00 d'Arolla, je suis arrivé au sommet à 15h11, à la vitesse d'un sexagénaire ventripotent. 3 personnes m'ont suivi jusque sur le haut glacier d'Arolla et ont bifurqué sur le refuge des Bouquetins, la suite en trio avec la Vierge à gauche et l'Evèque à droite. La vierge ressemble plus à un phallus  au garde à vous qu'à une pucelle éplorée pas déflorée.

Au col du Collon à 3068 mètres, très peu de neige et quand j'ai vu l'arrête finale en glace, j'ai bien crû que mes efforts seraient vains !  Conditions déplorables pour les 300 derniers mètres mais finalement passés aux couteaux avec mes crampons dans le sac à dos. Beaucoup, mais beaucoup moins de neige qu'en mai l'année passée. La descente partagée par une combe de la Vierge superbe en face Nord  et correcte jusqu'au bas glacier d'Arolla. La face Ouest, du sommet jusqu'au col déplorablement soufflée. La face Nord, bleue et de glace vive m'obligera d'y remonter un jour de printemps quand les hausses de températures vont coller la neige sur la glace vieillissante.

Glacier très peu crevassé mais comme je n'y suis jamais allé l'été, j'ai quand même pris une corde de 30 mètres, 2 piolets et tout le matos pour si jamais le plancher des vaches aurait décidé de jouer les trouble-fête.

Une journée éreintante mais de toute beauté, il faudra un jour que je réfléchisse sur la véritable motivation qui me pousse à faire des conneries pareilles !!

Pour la vidéo. 

 

 


3 Février Theysachaux 

Vite un ptit couloir central avant le boulot. Après 2 jours de neige, je m'attendais à beaucoup mieux. La limite de la pluie est bien remontée hier, et ce matin c'est gelé de partout sur une ancienne neige mouillée. Résultat béton à l'ombre et ça tourne très vite au soleil. Des bouffées d'air chaud me  chatouillent  le nez en arrivant sur la crête Sud. + 7° annoncé à 2'000 m. Yoyo garanti cette année. Je pense qu'il va falloir monter haut ce week-end pour avoir de la neige correcte ! J'étais content de mettre des skis "lourds" pour descendre. (session 95 Movement) Il faut quand même avouer que ça n'a rien à voir sur de la neige capricieuse entre carton et poudreuse compacte avec les Alps Track 90 que j'avais au Grand Tavé, que j'apprécie particulièrement lors de grandes courses. Degré 3 sur 5 SLF mais un 2 suffirait à mon avis. Surtout dans les Préalpes. Je pense que ça sera vite corrigé dès demain !

Je n'étais pas le premier dans le couloir, 2 traces avant moi.


29 janvier 2022 Grand Tavé  en solo (Val de Bagnes) 1700 mètres   Récit complet et photos


25 janvier Châtillon  (Les Mosses)

A faire en semaine en lieu et place d'une journée sur les pistes de skis inutiles, encombrées et bondées.

En partant du Commun des Mosses sur le parking des fondeurs. Cette course de 1'100 mètres reste une classique de la région. La transversale depuis le col du Tarent jusqu'au sommet reste engagée en cas de fortes précipitations neigeuses ou de glace. A faire avec un pied sûr et un minimum d'expérience. Possibilité de raccourcir en montant au col du Tarent. 150 m. de moins avec presque la même vue.


22 janvier Le Chatelet (Champex)

Montagne discrète qui se mérite par un chemin qui part depuis Champex en direction de la Cabane d'Orny (chemin d'été) souvent peu de neige par une exposition SE, il faudra marcher une heure avant de mettre les peaux au fond de la rivière qui se la coule douce dans la combe d'orny. Toute la montée de la combe est à l'ombre une bonne partie de l'hiver, préservant la neige des randonneurs et du soleil. Nous croiserons 3 tjeuns en recherche de pente raide et de sensations. Il arrive de croiser des guides avec des clients qui se font hélicoptèré  (prénom d'emprunt) sur le glacier du Trient. Mais la solitude reste au menu du jour avec une vue inhabituelle sur le glacier de Saleinaz et des Clochers des Portalets.


8 janvier Grand Six Blanc (La Fouly)

Avec une longue marche d'approche depuis Le Clou (la Fouly), cette montagne cachée dans le vallon du Bandarrey reste difficilement accessible en hiver et c'est tant mieux. Après une semaine sans chutes de neige, les traces restent à faire, la neige reste froide et le coup de coeur bien présent.


16 octobre Levé de lune au Bivouac des Pantalons Blancs

 

 

 

La nuit le glacier ne fait plus partie de cette planète toxique, il respire l'odeur du ciel. L'espace et le froid le font vibrer d'aise. Il reprend sa place dans un univers jamais fini mais presque infini. Il se cale entre les roches des montagnes environnantes, se gonfle et bombe le torse dans un instant de survie. La moraine n'a qu'à bien se tenir, il arrive, il palpite, il pousse et se faufile. Ses crevasses s'entrelacent et couinent de plaisir.


Arrête des Avagères Petit Combin samedi 9 octobre

Arrête Sud-est du Mönch